Aurès-Ichawiyen Imazighen -Afrique du Nord
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Aurès-Ichawiyen Imazighen -Afrique du Nord

Les Aurès : culture, débats et actualités
 
AccueilGalerieRechercherDernières imagesS'enregistrerConnexion
Le Deal du moment : -28%
Brandt LVE127J – Lave-vaisselle encastrable 12 ...
Voir le deal
279.99 €

 

 le blog de nacera beloulla

Aller en bas 
AuteurMessage
zalatoo
Invité




le blog de nacera beloulla Empty
MessageSujet: le blog de nacera beloulla   le blog de nacera beloulla Icon_minitimeVen 2 Fév - 17:52

La Vierge de Tifelfel

Aurès, l’an 115


C’était du temps des conquérants romains. Etais-ce à l’époque de l’empereur Trajan ? Qu’importe. De ces légionnaires qui passaient par ce pays des Chaouias construisant Thamugadi, Théveste et Mascula, un bel homme, fier dans son allure à la robe pourpre et casque brillant, arborant armes et armures, avait mis pied un jour à Tifelfel, établissant un fortin à l’entrée du défilé, afin de surveiller son passage et les villages qui, plus bas dans la vallée verdoyante, se chevauchaient presque … Mchounech Tamrit, El-Arrich, Banian, Tighanamine.

Il faisait doux et bon ce matin-là. Un printemps déjà précoce titillait la nature et sur les chemins tortueux, la destinée d’une jeune fille se dessinait. La vieille l’avait prévenu « Sur ton chemin aujourd’hui Ô ! Belle d’entre les belles tu enchaîneras ta vie.» Un rire cristallin répondit à la prédiction. Parée d’amulettes et de talismans « Quatre fois la terre aura tournée… juste quatre fois et ton sang de vierge aura couler » enchaîna la vieille.

« Me prédit-elle un mariage ? » Pensa la belle. Debout, immobilisée par les yeux noirâtres de la prêtresse qui pointait son doigt charnu vers elle dans une attitude agressive, les autres filles arrivaient derrière, en file indienne, cruches sur les épaules « Allez, avance, avance » lui criaient-elles dans un chahut gai.







La petite troupe reprit sa marche dans un tintement de bracelets ciselés et d’anneaux argentés, cliquetant joyeusement autour des fines chevilles. Le sentier montait péniblement jusqu’au sommet. La source convoitée, le seul point d’eau où les filles venaient puiser l’essentiel de leurs besoins, coulait généreusement abreuvant ; assoiffés, passants, voyageurs et vagabonds.







Pour se soulager de cette corvée toujours harassante, la jeune fille se mit à chanter. Sa voix mélodieuse s’éleva dans les airs, réveillant arbres et oiseaux, fleurs et abeilles, faisant frémir les vents et les nuages. Le chant s’éclata sur les rochers et sur les sentiers d’où arrivait le bel homme.

Il descendit de son cheval et s’approcha de la fontaine.

Ultime instant de rencontre. Les yeux se posèrent sur elle, sur ses courbes, détaillant sa taille fine enroulée dans une série de ceintures en laines tressées, accentuant la finesse et le galbe… Le regard s’attarda. Le sourire effleura les lèvres et une caresse interdite esquisse le geste. Des vagues tourmentèrent le soldat, pénétrèrent en lui en saccades le traversant de haut en bas.

Dans ces lieux lointains, sur cette piste poussiéreuse, lui qui avait traversé mers et montagnes, auréolé de gloires et de batailles gagnées Il venait de rencontrer sa défaite.



Le centurion se mit à la courtiser, surveillant ses allées et venues, rêvassant devant la fontaine, de ses yeux noirs et brillants. Il lui envoya avec des porteurs, présents et fleurs. La belle se tenait à distance.

Dans sa tête cheminaient de drôles d’idées. Elle savait qu’elle pouvait aider les siens en exploitant l’amour que lui offrait le Romain. « Il est puissant et riche. C’est un colonisateur qui a vaincu mon peuple en s’établissant sur la terre de mes ancêtres. Il est à mes pieds aujourd’hui, aux pieds des monts de ich Aziza » se disait-elle


Elle renversa sa tête, jouant avec sa chevelure d’ébène, les tchoûchânat (grands anneaux en argent) qui pendaient à ses oreilles balançaient gaiement. Câline, ensorceleuse, elle colla presque ses lèvres sur les siennes, le laissant entrevoir une infinie parcelle de jouissance et de volupté « je suis à toi, beau centurion, mais avant, tu dois faire quelque chose pour moi. Veux-tu faire quelque chose pour moi ? »


Le romain de la 6ème légion était près à vouer son âme au diable, pourvu que la belle puisse lui accorder ses faveurs.

Son doigt fin traçait sur la poitrine de l’homme des cercles imaginaires « veut-tu apporter de l’eau à mon village ? »

« Juste cela » se demanda le Romain.

Bientôt la berbère lui appartiendrait. Mais la tâche allait être pénible, longue et épuisante. Sans attendre davantage, encouragé par les caresses et les regards de sa belle, il se mit à l’œuvre. Il traça des plans, calcula des chemins, dessina des détours et des courbes, s’initia au savoir des architectes et embaucha de la main d’oeuvres. « L’eau arrivera au village de Tifelfel et à mes lèvres aussi » se disait-il.

Il s’abreuvera enfin et abreuvera cette soif intense qui embrasait sa gorge.

Les saisons s’écoulèrent, les hivers s’en allaient remplacés par d’autres et les étés remplissaient la vallée de chants de grillons. Quatre années s’étaient écoulées. Quatre années d’un dur labeur, de patience, de rêves interdits, de murmures suggérant, de frôlements incitants.

Par désir, par amour, le romain avait réussi à tracer un cour d’eau dans la roche, venant de la fontaine tout au sommet de la colline jusqu'au village.

Il réussit enfin son pari. L’eau arriva au village de Tifelfel.

Cette nuit…Oh ! Cette nuit la lune sera en lui. Elle lui avait donné rendez-vous le premier jour de la fontaine.


La belle, parée de tous ses atouts, robes en soie aux couleurs clairs, chamarrés, la gorge opulente ornée de bijoux en argent, le front appesanti de plaques et de chaînes, les yeux noircis et les joues fardées, se tenait offerte dans ce clair de lune qui s’auréolait autour d’elle, l’emprisonnant dans une lueur argentée.

Fébrilement, il s’approcha d’elle, posa ses lèvres fiévreuses sur les siennes. Il en rêvait de cet instant depuis des mois, depuis des siècles. Elle le laissa faire et ne dit mot. Ferma les yeux pour échapper à cette étreinte qui la faisait souffrir. Elle s’allongea sur la couche satinée du romain, lui, s’éloigna pour se débarrasser des ses armes. Quand sa tête se tourna vers elle, son regard s’assombrit, son geste se suspendit.

Une auréole de sang fraîche nappait le parterre, s’infiltrait dans le sol devenu humide. Sur la couche, les yeux ouverts, la main encore sur la manche de la dague enfoncée dans sa poitrine, la belle dormait d’un sommeil éternel.




extrai de son prochain livre djemina


http://nassiralettres.over-blog.com/


le blog de nacera beloulla Normal_g6ep
Revenir en haut Aller en bas
oriabel




Nombre de messages : 35
Age : 63
France : paris
Date d'inscription : 28/06/2007

le blog de nacera beloulla Empty
MessageSujet: Re: le blog de nacera beloulla   le blog de nacera beloulla Icon_minitimeSam 21 Juil - 9:25

superbe! j'aimerais avoir certains details pour trouver ce livre en librairie en France merci
Revenir en haut Aller en bas
 
le blog de nacera beloulla
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» blog chawi

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Aurès-Ichawiyen Imazighen -Afrique du Nord :: Culture auréssienne :: Evenements culturels-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser